> Cumulatio delenda est (2)

2 juin 2010

Dans son rapport sur la rénovation, Arnaud Montebourg développe les objections des certains parlementaires socialistes pour mieux les rejeter. Je me souviens que j’avais regretté qu’il ne prenne pas la tête du groupe socialiste à l’Assemblée nationale. Je comprends pourquoi ses collègues du Palais Bourbon se méfiaient. Le moment est venu de la fin d’une anomalie politique.

Rapport d’orientation sur la rénovation du Parti socialiste

III – Le programme de lutte contre le cumul des mandats

2.- Les objections des certains parlementaires socialistes

La première a reproché à ce programme de lutte contre le cumul des mandats de désarmer unilatéralement les candidats socialistes face aux candidats adverses qui, eux conserveraient la possibilité de cumuler. La Commission n’a pas fait sien cet argument.

Si le cumul des mandats était une assurance tous risques contre la défaite électorale, nous devrions être depuis longtemps victorieux aux élections législatives. En vérité, les élections législatives se jouent sur les déterminants nationaux (résultat des présidentielles, image du Parti socialiste, débat politique national). D’ailleurs, la fin généralisée du cumul des mandats que nous avançons en 2012 pour la totalité de nos candidats aux élections législatives devrait transformer en profondeur notre image collective, assurer un renouvellement décisif de nos visages dans la future alternance.

On peut observer que ce mouvement a reçu le soutien de nombreux députés, eux-mêmes en situation de cumul, qui ont fait savoir à l’auteur de ce rapport qu’ils considéraient comme positif ce programme de lutte contre le cumul et qu’ils s’y conformeraient, tout comme d’ailleurs l’auteur du présent rapport.

La deuxième objection a concerné nos chances de succès au Sénat en septembre 2011. Les détracteurs publics de ce programme de lutte contre le cumul ont imaginé qu’un tel programme porterait atteinte à nos éventuelles capacités à gagner des sièges de sénateurs lors du renouvellement par moitié au mois de septembre 2011, et éventuellement à gagner la majorité au Sénat pour la première fois sous la Vème République.

L’argument selon lequel un maire, un président de Conseil général ou de Conseil régional serait un meilleur candidat qu’un candidat sans fonction exécutive ne paraît pas convaincant.

En effet, il ne s’agit pas de demander aux intéressés titulaires de fonctions exécutives d’y renoncer avant leur campagne ou avant leur élection sénatoriale. Les intéressés pourront se présenter en situation de cumul en indiquant devant le corps électoral qu’ils abandonneront leurs fonctions exécutives afin de se consacrer à leurs électeurs. Cette obligation n’est en rien affaiblissante sur le plan électoral, elle est même un avantage par rapport à nos adversaires.

Après avoir étudié, département par département, le renouvellement sénatorial de 2011 avec le groupe socialiste au Sénat, il est apparu qu’il était difficile de voir dans la mise en œuvre du programme de lutte contre le cumul le moindre inconvénient dans la compétition électorale devant les grands électeurs du Sénat.

En effet, les candidats qui sont maires et voudraient se porter aux sénatoriales n’ont que des avantages à déclarer qu’ils quitteront la fonction exécutive qu’ils occupent, car ces maires ne seraient dès lors plus des maires (généralement de grosses villes) ayant obtenu un siège au Sénat, mais au contraire des sénateurs en mesure de défendre l’universalité des communes de leur département, et non plus la leur exclusivement de fait. Dans un scrutin qui surreprésente les communes rurales, il s’agit là d’un argument décisif qui augmente l’intérêt électoral de la lutte contre le cumul.

Si les candidats au Sénat sont présidents de départements et de région, l’argument de l’affaiblissement est sans aucune espèce de portée dans les départements où le scrutin se joue à la proportionnelle sur liste, car il s’agit de votes politiques davantage détachés du choix personnel. Cette remarque est tout aussi fondée dans les départements où le scrutin est uninominal, où la gauche est hégémonique et où la présence ou non du président de département ou de région ne changerait pas le résultat.

Il reste alors le cas des départements qui appliquent le scrutin uninominal et où la droite est dominante. Ces cas se comptent sur les doigts d’une main. Si on voulait alors insinuer que les Conseils généraux et régionaux sont des institutions à la tête desquelles il est plus aisé de mener une campagne sénatoriale en raison du caractère structurellement clientéliste de celles-ci, cet argument est lourdement affaibli en raison de la crise actuelle des finances locales qui ont conduit nombres de Conseils généraux et régionaux à interrompre ou diminuer fortement leurs subsides aux communes, rurales ou urbaines. De sorte que, dans le contexte actuel, la popularité des présidents de département et de région auprès des maires et grands électeurs du Sénat est tout à fait relative et pourrait même se révéler contreproductive dans l’élection sénatoriale.

Au total, tant en raison de la faiblesse concrète des arguments, que du tout petit nombre de cas concernés, le programme de lutte contre le cumul des mandats est à nos yeux sans aucune incidence sur le résultat des élections sénatoriales. Il pourrait même devenir un avantage pour accentuer nos chances de victoire.

La Commission a ainsi écarté, conformément au mandat des militants lors de la consultation militante du 1er octobre, tout traitement différent des candidats au Sénat et à l’Assemblée nationale. Les successions devront être prêtes avant l’élection et communiquées au parti pour obtenir l’investiture.

Le non cumul d’un mandat de parlementaire avec un exécutif local se réaliserait après chaque renouvellement parlementaire, soit après les élections sénatoriales de septembre 2011 et les élections législatives de juin 2012.

Le parlementaire élu, ou réélu, aura trois mois pour abandonner ses mandats exécutifs locaux, soit début janvier 2012 pour les Sénateurs et Septembre 2012 pour les députés.

Les départements conquis à l’occasion du renouvellement cantonal de mars 2011 ne pourront avoir de président de conseil général parlementaire.

Dans certains rares départements difficiles, il pourrait être proposé des dispositions transitoires tenant compte des fragilités inhérentes au mode de scrutin, en proposant aux sénateurs, présidents d’exécutifs (maires, président de Conseil régional, président de Conseil général, président de communauté de communes ou président de communauté d’agglomération) de maintenir leur participation à l’exécutif qu’ils présidaient en devenant vice-président ou adjoint jusqu’en septembre 2012, ainsi qu’aux sénateurs maires de communes de moins de 3 500 habitants, de le rester jusqu’à la même date à laquelle députés et sénateurs auront réalisé le mandat des militants du 1er octobre 2009.

9 Réponses to “> Cumulatio delenda est (2)”

  1. Politic nono Says:

    Mouiche…

    C’est sûr, il faudra arriver au non cumul des mandats… et il y a des urgences, notamment le cumul de postes gouvernementaux et d’exécutifs locaux (cf Christian Estrosi, toujours maire et président UMP de la Communauté Urbaine de Nice… c’est sûr que pour se reposer, il lui faut au moins 2 appart’s publics parisiens, lui !!!) et les députés européens (cf Christophe Béchu,toujours président UMP du Conseil Général du Maine et Loire -Angers-, et même conseiller régional des Pays de la Loire -Nantes-, grâce à un recours aussi dilatoire q’opportun (!!!), et censé travailler (outre, bouffre ?!?) à Strasbourg et Bruxelles !!!).

    Le Gouvernement de Lionel Jospin, bloqué au Sénat pour aller plus loin, avait d’ailleurs interdit ces deux cas… que la droite en 2002 s’est empressée de rétablir…

    Sans que l’électorat, malheureusement, ne lui en tienne en rien rigueur !

    D’où le danger d’un « désarmement » unilatéral…

    Et Martine Aubry… Elle ne « cumule » pas, elle, peut-être, entre Lille -Mairie et Communauté Urbaine- ET le PS…? C’est au moins aussi prenant qu’un siège parlementaire, non ??? HYPOCRISIE…

    Il est vrai qu’elle est « préservée » du cumul parlementaire, ayant été glorieusement battue aux législatives !!! Quant au PS, j’offre la champagne à qui me prouvera QUI était réellement -je n’ose dire honnêtement…- la vainqueure entre Ségolène et la coalition des anti « menée » par Aubry ?!?

    Martine, pourquoi tu tousses ??? (T’as un problème avec les urnes ???)

    Et si on laissait les miltants décider s’ils veulent, à Nantes, que leur maire Jean-Marc Ayrault continue à siéger à l’Assemblée Nationale ou à Dijon, François Rebsamen – comme François Patriat à a la Région- au Sénat, premiers élus de gauche à la Haute Assemblée dans ce département ???

    Ou, mieux encore, si on faisait des « primaires » locales, ouvertes aux électeurs de gauche, pour en décider ???

    En préparant sereinement une loi générale, qui s’appliquera à tous, droite et gauche…

    Déterminés, mais pas « idiots utiles » de la droite, SVP…

    BR

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  2. Hugues Says:

    Ton raisonnement te catalogue dans le camp de ceux qui exigent des solutions définitives pour mieux écarter toute mesure partielle. De désarmement unilatéral, je n’en vois pas puisque nous attendons les succès sénatoriaux pour exiger de nos honorables édiles la démission de leurs mandats locaux.

    Choisir quand il n’y a qu’un seul candidat n’est pas possible. C’est principalement le cumul dans le temps qui interdit le renouvellement. Donc, il est nécessaire de mettre un terme aux mandats trop longs. Si nous devions tout attendre des initiatives spontanées, nous n’aurions pas voté la parité pour les scrutins proportionnels. Sans contrainte, c’est l’anarchie. Les socialistes sont partisans de la régulation y compris politique. Une des nombreuses régulations que l’on a eu de cesse de différer. Je me félicite du volontarisme de ma Première secrétaire en la matière. Nous en tirerons collectivement -oserais-je dire électoralement ?- les bénéfices.

    Pour se prémunir contre les irrégularités que nous avons connues lors du vote de novembre 2008, il est proposé une Haute Autorité du Parti Socialiste (HAPS) composée majoritairement de personnalités qualifiées, non socialistes et non inféodées à telle ou telle candidature. C’est une manière de sortir de l’impasse de la commission de récolement des votes où chaque courant y délègue des correspondants qui agissent au nom de leur clientèle. La HAPS entend mettre un terme à une époque où chaque coterie -ie tout le monde- avait ses arrangements.

    Enfin, si ta toquade ségoléniste dure toujours, écoute le ralliement qu’elle a opéré avec Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry. C’est le chemin de la raison et de la tempérance.

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  3. politic nono Says:

    Si ça doit s’appliquer seulement à la gauche, et pas à la droite, ce n’est pas une mesure partielle, mon cher nucnuc, c’est une mesure partiale !!!

    Je reste dubitatif…

    Cela dit, pour revenir à nos origines nantaises, je t’accorde que Patrick Mareschal et Jacques Auxiette, Présidents « à plein temps » du Conseil Général de Loire-Atlantique et du Conseil Régional des Pays de la Loire, c’est très efficace !

    Mais tout dépend du moment et de la crédibilité déjà acquise, personnellement et collectivement…

    Pourquoi ne pas être pragmatiques ???

    D’autant que je doute que ce soit la préoccupation majeure des français, « pris à la gorge » par la politique de Sarko et de ses sbires, suppôts de la Doxa ultra-libérale (quoiqu’ils en disent !)…

    Y compris en termes de défense des Libertés, il y a des combats plus urgents et décisifs… l’Indépendance -ô combien malmenée !- de la Justice, par exemple, ou la régression de la « réforme » du « Défenseur des Droits » (notamment par rapport à la CNDH)

    Quant à l’honnêteté des scrutins au PS, j’attends de voir pour croire !!!

    Mais j’ai la conviction qu’un juge indépendant aurait annulé le « résultat » (?!?)de Reims… Robert Badinter avait d’ailleurs proposé de recommencer le vote, sous surveillance…

    Que ne l’a t’on écouté, et suivi !?!

    Alors, « faire la morale » pour les autres…

    (L’Infâme) BR

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  4. Hugues Says:

    Un parti politique prend des mesures… partiales. C’est bizarre non c’est un pléonasme ! En la matière Arnaud Montebourg ne prêche pas la morale mais l’exemplarité. Avec tes arguments aquabonistes et tes jugements à l’emporte-pièce, il serait urgent de ne rien faire. Je suis convaincu du contraire.

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  5. Politic nono Says:

    Montebourg… qui, après avoir longtemps refusé, dont acte, cumule son siège de député et la présidence du Conseil Général de Saone et Loire…

    Mais il était quand même déjà 1er secrétaire fédéral, non ? C’est beau, le club des poètes…

    Quants à nos amis Verts, intraitables sur ces questions d’organisation -comme toi…-, si je ne m’abuse, Noël Mamère est député-maire de Bègles depuis 1989 (!) et Dominique Voynet sénatrice-maire de Montreuil… (toujours aussi autoritaire et péremptoire si j’en crois la crise municipale avec les ex-PS qui l’avaient rejoint contre Brard…)

    Quant à Jean Vincent Placé, Vice Présisent en charge des Transports au Conseil Régional, voilà qu’il demande un siège de Sénateur de l’Essone… Et, d’après le Nouvel Obs, ta cheftaine lui proposerait plutôt de se parachuter chez elle dans le Nord…

    Si elle gère les candidatures aux sénatoriales comme celles des Européennes, effectivement, il y a peu de chances que le Sénat bascule à gauche (elle justifierait son intransigeance en disant ne pas croire à la victoire en 2011, toujours selon la presse)…

    Au lieu de se focaliser sur des problèmes internes, des propositions sérieuses, ambitieuses et réalistes face à la crise seraient mieux adaptées… non ?

    Et battons nous plutôt pour les Libertés Publiques -projet de réforme de la procédure pénale, secret-défense (l’attentat de Karachi et Sarko !), régression de la Commisssion Nationale de Déontologie et de Sécurité, HALDE…), etc !

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  6. Hugues Says:

    Nous ne manquons pas de réponses au gouvernement. Mon parti a proposé en son temps un contre-plan de relance, il s’est opposé aux nombreuses lois liberticides, il porte l’opposition parlementaire à la réforme de l’Education nationale, au plan d’austérité aveugle, et il a avancé des contre-propositions sur les retraites avant qu’il n’existe de projet gouvernemental.

    Sans les socialistes, il n’y a pas d’opposition. Ce n’est pas un commentaire, c’est un fait.

    Sur la rénovation, Martine Aubry fait un travail trop longtemps différé par son prédécesseur. Tu peux le regretter et te moquer de sa posture. Je m’en réjouis et je la féliciterai le moment venu. C’est au pied du mur que l’on juge le maçon.

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  7. Pino Says:

    Je n’ai rien lu sur les cantonales.
    Le sénateur Jean-Jacques Mirassou peut donc se représenter en 2011 et continuer à cumuler. C’est ça la nouveauté au PS?

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  8. Hugues Says:

    La nouveauté, c’est la limitation des mandats locaux dans le temps, pas plus de trois; c’est la fin du cumul du mandat de parlementaire avec une fonction exécutive locale. Le calendrier d’application s’étale de 2011 à 2014. Que les autres partis fassent pareil et, s’ils le veulent, aillent plus vite et plus loin. Je leur serait grandement reconnaissant. La nouveauté, c’est d’impulser un mouvement.

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  9. chouka Says:

    Vivement que cela se mette en place.

    Au fait, en parlant de cumul dans le temps, Pierre Izard a affirmé qu’il partirait au bout de 3 ans si je ne me trompe.

    Va t-il donc laisser la présidence en 2011 (ou encore mieux, le parti va t-il choisir quelqu’un d’autre) ?

    Ou va t-il invoquer la réforme institutionnelle par exemple pour dire que cela n’aurait pas de sens de partir maintenant…

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