> Les socialistes et la nation à Lafitte-Vigordane

20 novembre 2007

Nation

Accueillis par Joseph Toffolon, secrétaire de la section du Fousseret, et François Gouazé, maire de Lafitte-Vigordane depuis 1995, dans un équipement public flambant neuf, les militants de Haute-Garonne se sont donné rendez-vous pour traiter de la question nationale au travers des thèmes des institutions et de la laïcité.

Au travers la problématique des institutions, c’est de la place de l’Etat, des pouvoirs locaux et de la participation démocratique dont il a été question.

Jean-Michel Ducomte, militant socialiste, président national de la Ligue de l’enseignement et professeur de Sciences politiques, a diagnostiqué le désarroi idéologique qui assaille le camp du progrès. Ce trouble atteint les partis politiques, les syndicats et sans doute un peu moins la société civile. Il n’empêche que le débat sur nos institutions entre en résonance avec notre mémoire collective, ses moments de dévoiement comme ceux de déploiement.

Le régime parlementaire de la Cinquième république est dominé par l’exécutif. Les effets du quinquennat et de l’inversion des calendriers électoraux ont accentué la prépondérance présidentielle. Pour Jean-Michel Ducomte, seul le rétablissement de temporalités parlementaires, gouvernementales et présidentielles différentes peut assurer l’équilibre des pouvoirs. Pour cela trois solutions s’offrent à nous. La première est présidentielle. La France a certes un tropisme exécutif, mais notre pays connaît une réelle difficulté à faire l’apprentissage d’une stricte séparation des pouvoirs notamment en ce qui concerne l’autonomie du pouvoir judiciaire. La deuxième formule est celle du régime parlementaire. Le quinquennat rend cette solution improbable. La dernière voie est celle d’un aménagement des institutions actuelles sans entraîner de modifications majeures. C’est le chemin emprunté par le comité Balladur. Cette proposition n’envisage aucun rééquilibrage des pouvoirs et encourage une convergence des majorités trop grande.

Les socialistes doivent faire de l’indépendance du pouvoir judiciaire leur priorité. Mais s’ils veulent voir le rôle de l’Etat réaffirmé, ils doivent éclaircir les modalités d’affectation des compétences entre échelon européen, pouvoir national et collectivités locales. Il faut contrer les remises en cause de l’arbitrage public. Le « Grenelle de l’environnement » montre l’enjeu d’une redéfinition de la responsabilité centrale des pouvoirs publics. En ce qui concerne l’Europe, il est nécessaire de faire partager à nos voisins la vision d’une Europe-puissance. Pour la décentralisation, il est indispensable de lutter contre la dispersion. En ce qui concerne la réforme de la carte judiciaire, il serait plus judicieux de commencer par redéfinir notre carte administrative. Si la gauche ne le fait pas, personne ne le fera. Enfin, il faut autant que faire se peut, éviter les substituts de l’action publique.

La question de la légitimité politique est également posée. Il faut élargir le périmètre du droit de vote aux étrangers et aux plus jeunes. Au-delà du pouvoir des élus, nous devons reconstituer des structures de contestation. Il faut savoir à nouveau allier une critique radicale de la société et une pratique intelligente des institutions. C’est à ce prix que nous reconstruirons de la durée politique en conjuguant mémoire, projet et action. Rien n’est pire que l’instantanéïsme ou l’écrasement du temps politique. Pour cela, une articulation vivante entre société civile, partie politique et syndicat reste à trouver et à bâtir.

En ce qui concerne la laïcité, les échanges ont porté sur les nouvelles batailles de la pierre angulaire du projet républicain. Francis Sancerry, conseiller général, a rappelé le principe de séparation des sociétés civile et religieuse comme l’idéal de tolérance contenu dans le principe constitutionnel de laïcité.

La citoyenneté suppose qu’on se mette à distance de ses appartenances communautaires, et notamment religieuses, mais notre monde moderne encourage de moins en moins cette prise de recul. La plupart du temps certains de nos compatriotes sont renvoyés vers leurs racines. Des professions entières sont touchées par le phénomène : médecins, enseignants, travailleurs sociaux. Il faut rappeler que le respect du cadre légal ne peut souffrir la discussion quelle que soit son opinion personnelle. Si l’émancipation qui est à l’origine du projet laïque semble rétrograder, ce n’est pas une raison pour que les socialistes se résolvent à cette régression de l’esprit public. C’est toute la question du vivre ensemble qui est en cause.

Aussi, être tolérant ne doit pas signifier être indifférent. Le défi consiste à adosser à notre citoyenneté un certain nombre de valeurs qui lui donnerait plus de force et sans doute aussi plus de transparence.

La nation pose la question du comment faire société. Nos institutions et le principe de laïcité sont des outils pour construire un projet d’intégration. C’est pourquoi la nation ne doit pas être un concept-refuge. Il faut suivre l’itinéraire politique d’Ernest Renan qui faisait de la république « un plébiscite de tous les jours. » Notre défi d’hommes et femmes de gauche consiste à recréer les conditions d’affirmation de l’espace public. Ce projet est ancien. Il est identitaire et demeure inachevé.

Prochains rendez-vous : « les socialistes et le marché, » samedi 8 décembre 2007 à Saint-Jean et « les socialistes et l’individu, » samedi 12 janvier 2008 à Tournefeuille.

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